Le changement climatique et ses enjeux viennent rappeler à l’humanité la nécessité de la solidarité. Celle du Nord vis-à-vis du Sud, celle des pays riches à l’égard des pays émergents. Autant d’engagements à venir qui concernent les citoyens et donc les salariés.

La communauté scientifique s’accorde très largement aujourd’hui sur la notion d’anthropocène qui désigne l’ère géologique dans laquelle est entrée la Terre du fait de l’action de l’homme. Cela signifie que les activités anthropiques  sur le système terrestre sont désormais prépondérantes. Ce phénomène nouveau montre que l’humanité a une responsabilité nouvelle et globale pour la planète, dont celle de se préoccuper – entre autres maux – du réchauffement climatique. Le premier engagement sur ce sujet à l’échelle planétaire date du Sommet de la Terre de Rio, en 1992. Les négociations internationales accoucheront finalement du protocole dit de Kyoto, entré en vigueur il y a dix ans (février 2005) et imposant pour la première fois des réductions d’émissions de GES (gaz à effet de serre) aux pays du Nord.

Réchauffement et libéralisation

Qu’en est-il aujourd’hui de la gouvernance climatique face à cette urgence qui n’en finit pas … de durer ? « La gouvernance climatique n’a pas eu de prise réelle sur les causes profondes du problème climatique. Le réchauffement est le résultat d’une certaine forme de mondialisation et de libéralisation de l’économie qui s’est imposée dans les années 1980 et 1990, déterminant aussi la trajectoire des pays en développement. » Ces propos de Stefan Aykut, sociologue (1), donnent un éclairage singulier à la COP 21 et à ses préparatifs… La COP 21, soit la 21ème Conférence des parties de la convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques, va se dérouler à Paris du 30 novembre au 11 décembre prochain et réunira 196 pays. Une conférence dont l’objectif est de trouver un accord sur des mesures permettant de limiter le réchauffement climatique en deçà de 2 degrés. « 1,5 degré » réclament d’ores et déjà les pays en développement, ce qui nécessite en outre selon eux un engagement plus ferme des pays riches pour soutenir leurs efforts.

Solidarité ou concurrence ?

Vendredi 23 octobre était rendu public le projet de texte accouché au terme de négociations entre 195 pays réunis à Bonn (Allemagne), document censé servir de base à la conférence parisienne. Comme le titrait le journal L’Humanité, « La COP 21 devra choisir entre la solidarité et la concurrence », tant il apparait que les divergences restent très vives entre pays du Nord et du Sud, notamment sur la question du financement des aides, dont le montant est évalué à 100 milliards de dollars. Pour la FNME-CGT (2), alors même « que des millions de personnes sont déjà aujourd’hui des migrants climatiques, nous ne pouvons rester indifférents au sort de ces populations qui subissent de plein fouet les conséquences de décennies de sur consommation d’énergies fossiles par les pays développés. » D’où l’absolue nécessité de poser la question du droit à l’énergie [lire page 14] « comme une composante fondamentale du développement de l’humanité. »

Une question syndicale

Les solutions à la question climatique, par son caractère planétaire, ne concerneraient-elle que les états et leurs gouvernants ? A cette question la CGT répond catégoriquement… « L’action climatique est aussi une question syndicale. Nous avons un rôle essentiel à jouer. Protéger les emplois dans les industries et sur les lieux de travail actuels en exigeant une transformation industrielle. Organiser les travailleurs occupés à  des emplois de qualité qui se créeront dans l’économie écologique naissante et lutter en faveur de mesures de transition juste. » C’est à une vigilance accrue qu’appelle d’ailleurs la CGT et notamment la FNME, car « les bulles financières autour de l’écologie, notamment développés dans l’énergie, sont dangereuses. In fine ce sont les salariés qui sont laissés pour compte au bord du chemin. » « Pour diminuer les GES, comment fait-on, dans l’énergie ou l’industrie ? Quelles sont les actions concrètes fortes que l’on peut porter sur les secteurs les plus contributeurs  tels que les transports ou le logement ? Comment repenser les manières de produire, l’appareil industriel, au plus proche et dans les territoires ? Ce sont toutes ces questions que nous voulons porter au moment de la COP 21 auprès des salariés » précise Marie-Claire Cailletaud, animatrice du pôle fédéral Politique industrielle et énergétique. « C’est le sens de la participation de la CGT à la manifestation du 29 novembre (3). »

Enjeux multiples

Au travers des enjeux climatiques, à quelques semaines de la COP 21, les économistes s’empoignent sur les modes de financement, les juristes lèvent le doigt en soulignant combien le niveau d’obligation juridique du futur accord sera déterminant. Les grands groupes industriels, notamment énergétiques, fourbissent eux aussi leurs arguments et leurs solutions techniques, alors même que les questions de recherche par exemple [lire page 15] restent au point mort… Les syndicalistes, eux, dénoncent. A l’image de Dominique Launay, secrétaire général de l’UIT (Union interfédérale CGT des transports), qui s’inquiète de la généralisation du « low cost », cette politique des bas coûts qui, dans les transports – mais aussi dans l’énergie – représente « la spirale du déclin qui fait que tous les niveaux, sociaux, environnementaux, de sécurité ou de qualité, s’abaissent. » Pour la CGT, « citoyens et salariés ne doivent pas regarder cette COP 21 de loin. Car les conséquences de cet accord vont peser sur le quotidien de tous les habitants de la planète. »

(1) Cité dans le quotidien Le Monde du 17 février 2015, à l’occasion de la sortie de l’ouvrage Gouverner le climat (aux Presses de Sciences-Po), co-écrit avec l’historienne des sciences Amy Dahan.

(2) http://www.fnme-cgt.fr/index.php/page/nos-actions/energies-climat/cop-21-kezako