Madame la première Ministre,

Les prix du gaz et de l’électricité atteignent des nouveaux sommets. Pour beaucoup de nos concitoyens pour qui la fin du mois commence de plus en plus tôt et notamment les jeunes en situation de grande précarité, il faudra parfois choisir entre se chauffer ou se nourrir. Face à l’explosion des prix de l’énergie, de nombreuses entreprises prennent des mesures telles que le développement du travail de nuit et des week-ends, la baisse voire la fermeture de production et/ou de services occasionnant des mises en chômage partiel des salariés avec à la clé une baisse de la rémunération. Salariés qui, comme nombre de citoyens, sont déjà fortement impactés par le niveau de l’inflation. La flambée des prix de l’électricité et du gaz impacte aussi lourdement les finances des collectivités locales. Leurs dépenses énergétiques ont bondi, faisant peser une contrainte forte sur leurs budgets. Certaines penchent pour la fermeture des services publics locaux pourtant essentiels à la population. D’autres envisagent de reporter leurs projets d’investissements ou d’augmenter les impôts locaux.

Au final, ce sont toujours les salariés – actifs et retraités – qui paient la facture et dont les conditions de vie se dégradent. A l’opposé des choix politiques faits par le gouvernement qui favorise à la fois la spéculation sur les prix de l’énergie, la crise énergétique et écologique, la CGT exige la création d’un service public de l’énergie. Il est indispensable que la production, le transport et la distribution/commercialisation des énergies sortent de la loi du marché.

Ce service public garantirait aux particuliers, aux industriels et aux collectivités locales l’égalité d’accès, la continuité de fourniture, la sécurité d’approvisionnement, la capacité d’adaptation, l’indépendance vis-à-vis d’intérêts privés et de la géopolitique, la protection de l’environnement.

Pour que l’intérêt écologique prime sur le profit financier, il faut :

  1. Une sortie du marché pour un service public avec pour mission centrale la lutte contre le
    réchauffement climatique.
  2. Un tarif unique et basé sur les besoins.
  3. Une fiscalité de l’énergie plus juste.
  4. Une solidarité renforcée et un droit fondamental d’accès à l’énergie.

Dans l’immédiat, bien plus efficace et structurant que le « bouclier tarifaire » et le chèque énergie, vous trouverez ci-après, Madame la première ministre, les mesures d’urgence proposées par la CGT. Nous vous demandons d’en prendre la mesure et toutes les mesures …

En urgence, ce que nous proposons pour tous les usagers :

  • Garantir le droit d’accès à l’énergie et revenir à un tarif règlementé pour tous (particuliers, entreprises et collectivités).
  • Interdiction des coupures d’énergie et des limitations de puissance. Mesure qui doit être appliquée par tous les fournisseurs d’énergie.
  • La baisse de la TVA à 5,5% sur la consommation d’électricité, à l’image de l’abonnement. L’électricité et le gaz sont des produits de première nécessité, la taxation à 20% n’est pas justifiée.
  • La baisse de la Contribution au service public de l’électricité (CSPE) dont les recettes sont affectées à des missions de service public seulement pour moitié, le reste étant versé sans fléchage au budget de l’État.
  • La baisse de l’ex-Contribution au Tarif Spécial de Solidarité Gaz (CTSSG) inclue maintenant dans la Taxe Intérieure sur la Consommation de Gaz naturel (TICGN).
  • Des facilités de paiement des factures d’énergie et prêts garantis par l’état à 0% pour la fourniture d’énergie aux particuliers.

En urgence, ce que nous proposons pour les salarié-e-s :

  • Consultation obligatoire et avis conforme des Instances Représentatives du Personnel sur la stratégie de gestion énergétique de l’entreprise (sobriété, investissement pour réduire la facture énergétique,…) et ses impacts sur l’emploi, ses activités économiques et son empreinte carbone.
  • Le maintien d’une rémunération à hauteur de 100% pour les salariés mis en activité partielle courte ou longue durée et payés par l’entreprise intégrant les cotisations sociales.
  • Utilisation des périodes de baisse d’activité pour dispenser des formations qualifiantes aux salarié-e-s.
  • Interdire les licenciements et toutes réductions d’effectifs CDI dans les entreprises ayant recours au chômage partiel.
  • Interdire les fermetures des moyens de production des groupes du CAC 40, des grandes entreprises et des donneurs d’ordre.
  • Indexation obligatoire des éléments de rémunération liés aux coûts de l’énergie.
  • Prise en charge par l’employeur au coût réel de l’ensemble des frais inhérents au télétravail.
  • Renforcer et rendre plus strict le contrôle de l’inspection du travail lors des demandes de mise en activité partielle.

Cela pourrait très bien être financé dans l’immédiat par l’instauration d’une taxe sur les super profits, le versement de dividendes et rachat d’actions des grandes entreprises (à titre d’illustration groupes pétroliers et énergétiques, armateur CMA-CGM,…).

En urgence, ce que nous proposons pour le soutien de l’activité économique :

  • L’attribution d’aides publiques aux entreprises sous conditionnalité et contrôle avec avis conforme des instances représentatives du personnel et principalement les dispositifs d’aide aux entreprises grandes consommatrices de gaz et d’électricité
  • Soutenir et contrôler les investissements nécessaires à l’amélioration des performance énergétiques des bâtiments (isolation, menuiserie, système de chauffage basse consommation)
  • Financer et développer la recherche et développement publique pour atteindre 3% du Produit Intérieur Brut.

Cela pourrait très bien être financé pour sortir du « quoi qu’il en coûte » par un redéploiement pour partie des 8 milliards de crédits inscrits au plan « France 2030 » pour le secteur de l’énergie.

En urgence, ce que nous proposons pour les collectivités territoriales :

  • La revalorisation à la hausse des dotations globales de fonctionnement.
  • Des moyens financiers supplémentaires pour permettre d’investir dans la rénovation énergétique des bâtiments publics locaux.
  • Elargir l’accès au tarif règlementé à l’ensemble des communes.

A moyen et long terme, la CGT revendique :

  • La sortie de l’énergie du marché et le retour des entreprises du secteur de l’énergie en monopoles publics régulés, avec pour seules boussoles l’intérêt général : des tarifs fixés à partir des coûts de production-transport-distribution, restaurer la proximité avec les usagers, combattre la précarité énergétique et favoriser l’investissement dans un mix énergétique pilotable et bas carbone. Cela implique d’abroger les dispositions de la loi Nouvelle Organisation des Marchés de l’Electricité.
  • La souveraineté des moyens de production énergétique et la concentration des moyens pour l’accompagner, avec des objectifs contraignant pour les grandes entreprises d’améliorer leur consommation d’énergie.
  • Le développement de filières françaises de productions de l’extraction des matériaux au recyclage, notamment en matière d’énergies renouvelables.
  • Une transition écologique déterminée, anticipée, accompagnée de l’ensemble des moyens de l’état et financée en partie par la taxation des profits financiers.
  • La réduction du temps de travail à 32 heures pour limiter les impacts de la hausse du coût de l’énergie et de l’activité partielle.

Recevez, Madame la première Ministre, l’expression de nos salutations distinguées.

Véronique MARTIN (Secrétaire confédérale) et Fabrice ANGEI (Secrétaire confédéral)